" Je crois à la résolution future de ces deux états,
en apparence si contradictoires,
que sont le rêve et la réalité,
en une sorte de réalité absolue, de surréalité
si l'on peut ainsi dire "
en apparence si contradictoires,
que sont le rêve et la réalité,
en une sorte de réalité absolue, de surréalité
si l'on peut ainsi dire "
André Breton Manifeste du surréalisme
Katia Djanaëff a étudié à l'Institut d'Art et d'Archéologie de Paris et a obtenu un DEA en philosophie aux Universités de Lille et de Paris-Sorbonne. Elle a également vécu quarante ans à Lille où elle était urbaniste au Ministère de l'Equipement.
Ci-dessous des extraits de son prochain ouvrage, reproduits grâce à son aimable autorisation :
Ci-dessous des extraits de son prochain ouvrage, reproduits grâce à son aimable autorisation :
" Il y a plusieurs lectures possibles d'une même œuvre d'art, mais sans doute les meilleurs écrits, ceux qui rendent l'œuvre plus proche de notre intelligence et de notre sensibilité, viennent de personnes liées au créateur. Pour voir il faut du temps, un œil exercé ne suffit pas, il faut un œil patient, or je regarde la peinture de Louis Nahi depuis combien de temps déjà ? Je ne sais, mais depuis fort longtemps ... Les émotions artistiques ne naissent pas sur fond d'incompréhension, mais elles ont besoin de contemplation et pour savoir regarder, il faut accepter d'apprendre.
Cet essai critique sur l'œuvre de Nahi a pour objet de donner des mots pour voir, mieux voir peut-être une peinture que nous sommes nombreux à aimer, même si aucune reconnaissance " officielle " ne lui a malheureusement jamais été témoignée.
Les données biographiques, auxquelles on accorde souvent une place majeure lorsqu'on rédige un ouvrage sur un peintre, ne sont pas toujours fécondes pour parler de la peinture. Le choix proposé est de donner la priorité à l'observation. On ne se réfère pas aux tableaux pour illustrer un discours souvent poétique, mais on part du regard porté sur les œuvres pour, pas à pas, découvrir l'iconographie et le langage pictural du peintre ... "
Cet essai critique sur l'œuvre de Nahi a pour objet de donner des mots pour voir, mieux voir peut-être une peinture que nous sommes nombreux à aimer, même si aucune reconnaissance " officielle " ne lui a malheureusement jamais été témoignée.
Les données biographiques, auxquelles on accorde souvent une place majeure lorsqu'on rédige un ouvrage sur un peintre, ne sont pas toujours fécondes pour parler de la peinture. Le choix proposé est de donner la priorité à l'observation. On ne se réfère pas aux tableaux pour illustrer un discours souvent poétique, mais on part du regard porté sur les œuvres pour, pas à pas, découvrir l'iconographie et le langage pictural du peintre ... "
" Dans ce tableau, la représentation de la mère et de l'enfant est humaine, hiératique et religieuse et pourtant totalement irréelle. Les lignes qui séparaient les couleurs dans les toiles précédentes s'estompent, un mouvement se propage, l'image est flottante. L'essentiel est la mise en relation de la mère et de l'enfant dans un fantasme utérin ouvert à l'infini, grâce à l'enchevêtrement et à la dilution des tonalités. Le sentiment fusionnel est si puissant, que la sentimentalité n'a pas jour. On est dans un au-delà de l'expression de la tendresse. Ce tableau permet d'aller plus loin dans ces représentations vertigineuses : la mère et l'enfant émergent d'un modèle qui évoque l'eau et qui nous entraîne dans le sentiment de l'illimité et de l'infini, et l'on ne peut s'empêcher de se référer à ce sentiment océanique dont parle Freud dans Malaise dans la civilisation. Le sentiment océanique serait une trace d'un état du moi précoce qui se vivrait comme un état d'indifférenciation entre le dedans et le dehors, entre la mère et l'enfant. Cet état n'est pas sans rappeler le sentiment amoureux qui se nourrit toujours de nostalgie (littéralement douleur du nid). "
Tableau 116 x 81 cm - N° 50 P - Collection particulière, 2000
" Cette tête d'animal se présente comme un portrait de trois quarts. La ligne structure la tête, le plateau où celle-ci repose est le pilier-support qui pourrait aussi bien être le cou de la bête. Le modelé fait s'entremêler les couleurs jaune, blanche, verdâtre, couleurs que l'on retrouve dans les derniers portraits, lorsque les peintres essayaient de garder la mémoire tangible de cette ultime étape de la vie qu'est la mort, avant que ne vienne la décomposition finale. Dans cette tête en putréfaction, la vie affleure encore comme en témoignent les filets de sang rouge qui maculent la tête de l'animal impassible, et comme en témoigne également l'ultime regard, par l'œil droit suggéré, tandis que l'œil gauche est déjà blafard et fermé en lui-même dans la blancheur du linceul. On ne peut qu'admirer le calme et la sensation de transcendance qu'exhale cette tête d'animal dans les derniers signes de la vie, avant la disparition totale ".
Toile 55 x 38 cm - N° 10 P - Collection particulière, 1975
Toile 55 x 38 cm - N° 10 P - Collection particulière, 1975
" Dans cette toile, c'est la réalité telle qu'elle apparaît à notre sensibilité visuelle qui est montrée. La mer et le ciel sont dans une relation de mouvance que traduisent le fondu et le dégradé des couleurs. Les éléments d'ombre et de lumière, le spectacle n'est plus enfermé dans des lignes et des surfaces déterminées. Les couleurs seules créent les volumes. Les éléments de la nature sont saisis dans leurs vibrations (on retrouve l'orphisme !). Le ciel et la mer se montrent dans une étroite relation picturale et nous apparaissent dans leur compénétration de couleurs et d'atmosphères, et dans leur apparition mouvante sinon mouvementée. Unité absolue de l'ensemble, chaque partie ayant perdu son existence particulière.
Par ailleurs, le spectacle se donne dans une forme ouverte : l'ensemble de la composition du tableau apparaît comme un fragment d'une réalité découpée par hasard et à laquelle nous participons l'espace d'un instant. On n'est plus dans l'intemporel des périodes précédentes et dans la limite naturelle des objets à l'intérieur du cadre. Le spectacle se prolonge au-delà. D'une facture classique, nous sommes passés à une facture baroque.
Cependant, il n'y a jamais de rupture totale dans la vie et dans l'art, et l'on retrouve la puissance et la beauté des couleurs de la période abstraite : les bleus, les rouges, le vert, le noir même, et ces couleurs évoquent ici un cheminement limite entre la représentation sensible du réel et l'exaltation de l'émotion que provoque le spectacle de la nature ".
Par ailleurs, le spectacle se donne dans une forme ouverte : l'ensemble de la composition du tableau apparaît comme un fragment d'une réalité découpée par hasard et à laquelle nous participons l'espace d'un instant. On n'est plus dans l'intemporel des périodes précédentes et dans la limite naturelle des objets à l'intérieur du cadre. Le spectacle se prolonge au-delà. D'une facture classique, nous sommes passés à une facture baroque.
Cependant, il n'y a jamais de rupture totale dans la vie et dans l'art, et l'on retrouve la puissance et la beauté des couleurs de la période abstraite : les bleus, les rouges, le vert, le noir même, et ces couleurs évoquent ici un cheminement limite entre la représentation sensible du réel et l'exaltation de l'émotion que provoque le spectacle de la nature ".
Toile 114 x 162 cm - N° 100 P - Collection particulière, 1990
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